Le moins que l’on puisse dire, c’est que le collectif Jewe slam a abattu un travail de titan. Organiser un festival de slam sur les terres burundaises, voila ce qui relevait de l’impossible il y’a quelques années. Forme artistique relativement nouvelle dans ce pays- la première scène slam ne remonte qu’a 2009-, personne ne donnait cher de sa peau quant à l’évolution autant exponentielle que fulgurante en un si petit temps. Pendant une décennie, le slam a su se défaire du cliché selon lequel c’est un truc de jeunes snobs issus des quartiers huppés de Bujumbura qui se rencontrent entre petits groupes pour faire comme les slameurs qu’ils matent à longueurs de journées sur Youtube. Maintenant, cet art oratoire est particulièrement apprécié par la jeunesse burundaise qui y trouve un moyen de s’exprimer sur leurs préoccupations, leurs problèmes, leurs rêves les plus fous etc.vu que le monde médiatique burundais ne donne pas une grande part à cette partie de la population, s’intéressant beaucoup plus aux sujets politiques.
Dans les quartiers populaires, des groupes de slam naissent en grand nombre. Même loin de la ville de Bujumbura, la vague du slam déferle. A l’intérieur du pays la mayonnaise prend petit à petit. A titre d’exemple, à Gitega, au centre du Burundi, il y’a un concours de slam qui oppose des slameurs qui étudient dans les écoles secondaires de Gitega. Le collectif Empire slam, lui-même constitué par les slameurs de Gitega organise l’événement de A à Z avec l’appui logistique de l’Alliance Franco-burundaise de Gitega. Plus au Nord du pays, Ngozi devient aussi petit à petit une terre de slam. Des slameurs issus des groupes de slam constitué dans les lycées de cette province émerveillent souvent le public bujumburois quand ils font le déplacement dans la capitale économique du Burundi où, chaque quatrième jeudi du mois, une scène slam est organisée.
Un menu plus qu’alléchant
Vuga est un mot Kirundi que l’on pourrait traduire littéralement par « Parle! ». Mais force est de constater que ce festival a eu le génie de pousser ses horizons au-delà de l’art oratoire. Tenez, il y’a la photographie. « Que vient faire la photographie dans un festival de slam? » pourrait se demander plus d’un. Selim Harbi, un photographe professionnel qui a effectué le déplacement depuis l’Allemagne, lui trouve une zone d’intersection entre le slam et la photographie. « La photo comme le slam ont vocation de narrer une histoire, un fait, un sentiment. Au lieu de chercher ce qui différencie les formes artistiques, le mieux est de trouver plutôt leurs points communs, » explique ce Tunisien d’origine qui s’est installé dans le pays de Goethe.
Le street slam, une nouveauté apportée dans le monde du slam burundais qui va beaucoup plus rapprocher cet art avec les communautés locales en organisant des scènes slam en pleines rues. Longtemps confiné dans certaines cérémonies, salles de spectacles et autres scènes, le slam va à la rencontre de son public grâce à Vuga Festival.
Ajoutez à cela, des ateliers d’écriture animés par les slameurs internationaux comme Caylah et Croquemort, le collectif des blogueurs burundais Yaga sur l’utilisation effective et responsable des réseaux sociaux, la photographie narrative. Cerise sur le gâteau, trois soirées, une dédiée à la région des grands lacs, une autre à la femme (soirée slam au féminin où la gent féminine se lâche sur les tabous qui la restreint, ses forces, ses aspiration, ses coups de gueules) ainsi que la dernière, la grande pour boucler la boucle en réunissant sur scène toute cette constellation de slameurs, locaux comme internationaux présent à Bujumbura.
Regarded un live stream de performances enregistrées par Yaga Burundi ici / Watch a live stream of performances recorded by Yaga Burundi here Vuga Festival