Campagne électorale au Tchad, manifestations et arrestations

© Deuhb Zyzou

Le 11 avril prochain les tchadiens iront aux urnes pour les élections présentielles. Si les campagnes ont véritablement commencé il y’a deux semaines environ, c’est seul le président sortant Idriss Deby qui est visible et bat campagne « contre lui-même ». Ceux qui l’accompagnent (l’opposition) brillent par leur absence sur le terrain. Entre temps le Tchad vit au rythme de la grogne sociale, des manifestations chaque semaine.

C’est contre lui-même que le président tchadien au pouvoir depuis 31 ans bat campagne. L’absence des figures de poids comme Saleh Kebzabo, Laoukein Medard, Ngarledji Yorongar, Masra Succès, Yaya Dillo et Baba Ladé, écartés par la CENI ou boycottés par les autres confère à Idriss Deby une élection sans inquiétude. En campagne à N’Djamena d’abord et dans les autres villes du Tchad, Idriss Déby ne s’attarde pas sur le bilan de ses 30 années de pouvoir dans un pays où tous les indicateurs sont au rouge. Mais l’homme fait des promesses et tient toujours le discours sur « le vivre ensemble », « la sécurité »… ses thèmes de prédilections. Pour beaucoup d’observateurs cette élection présidentielle d’avril 2021 n’a aucun effet de surprise, Idriss Deby n’a aucun candidat sérieux en face de lui. A N’Djamena, dans tous les coins et les recoins de la ville, c’est le Maréchal du Tchad qui inonde la ville avec des effigies sur des grands panneaux publicitaires, des banderoles, des gadgets de toutes les qualités. Même constat dans les régions du nord, de l’est aussi du sud du Tchad et à l’ouest. Sur les reseaux sociaux, c’est encore Idriss Deby Itno qui règne en maître. Plusieurs pages vouées à sa cause sont créées et sponsorisées par les militants du Mps (son parti). C’est en grand favori que Idriss Deby va vers son 6e mandat après 31 ans passé à la tête du Tchad (pour rappel).

© Deuhb Zyzou

Contre toute attente, Masra a rencontré Idriss Déby

L’actualité politique de ces dernières semaines est aussi marquée par la rencontre de celui qui est aux yeux de tous les tchadiens comme un farouche opposant à Idriss Deby Itno, Masra Succès avec le président tchadien le 16 mars 2021 à la résidence privée de ce dernier. « Nous sommes allés parler à cœur ouvert de la transition vers un Tchad nouveau, par le dialogue entre tous avant les prochaines élections, qui à notre sens doivent être différées. Et nous revenons vers le peuple et toutes les forces vives pour mettre en commun ces propositions et les mettre à disposition de tous », justifie Masra Succès. « Aucun sujet tabou. Le Tchad doit inéluctablement s’inscrire vers la transition car toutes les fondations de la nation sont aujourd’hui à terre. RV en point de presse pour en parler en détail. Et citoyens, faites nous parvenir vos propositions écrites », écrit-il sur sa page facebook après la rencontre avec le président Deby.

« Les genies font des erreurs, souvent c’est très fatales », écrit un internaute. Pour beaucoup, cette rencontre est inappropriée. Ce n’est pas le moment de rencontrer Idriss Deby Itno qui refuse d’ailleurs de reconnaître la légitimé du mouvement ‘Les Transformateurs’. Pour de nombreux jeunes, Succès Masra incarne à lui seul l’espoir d’un changement, mais au Tchad, aucun leader de l’opposition ou de la société civile n’a rencontré Idriss Deby et s’en sort ‘crédible’. Les tchadiens pensent que Masra a commit une bourde et cela restera longtemps dans les annales. Certains se sont sentis ‘trahis’ par Masra Succès. Cependant il y’a d’autres internautes qui pensent que cette rencontre historique est un pas important pour le Tchad. Une chose est sûre, s’il devrait y avoir un gagnant lors de cette rencontre, ça ne sera pas Masra Succès.

Un 6e mandat de trop, selon la rue

En même temps dans les rues de N’Djamena, la colère gronde. Le 6e mandat du président tchadien est considéré comme un mandat de trop à la tête du Tchad, un Etat néant. Des marches pacifiques se multiplient depuis bientôt deux mois. Une marche dénommée « la marche du peuple », initialement organisée par le mouvement ‘Les Transformateurs’ secoue la ville de N’Djamena tous les samedis, puis suivie par une autre marche appelée ‘Wakite Tama’ en arabe tchadien qui se traduit par ‘il est temps’, ‘ l’heure est arrivée à terme’ initiée par la société civile et les partis de l’opposition. Les diplômés sans emplois à qui Idriss Deby a promis 2000 emplois il y’a quelques eux aussi manifestent tous les jeudis. C’est chaque semaines que plusieurs leaders se font arrêtés comme se fut le cas des défenseurs des droits humains Mahamat Nour Ibedou, de Khalid Daoud, le journaliste et activiste Avenir de la Tchiré, de Toussaint Balama, de l’opposant Djékonbé François et de l’artiste N2A Téguil sans oublier de nombreuses personnes. Pour l’artiste N2A : « Le régime de Deby a déjà handicapé le Tchad, pas question de le laisser fuir avec les béquilles », faisant allusion à la situation du Tchad qui semble ne pas changer depuis longtemps. Plusieurs autres personnes sont arrêtées chaque semaines au Tchad.

Si la pression monte dans la capitale tchadienne pour ’empêcher’ le 6e mandat de Deby, les chance à son aboutissement sont minimes. « Le Tchad est par terre. C’est un véhicule dont le moteur est en panne », déclare l’opposant Pahimi Padacké Albert.

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