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Abdramane: Bonjour, bonsoir, bienvenue dans ce podcast consacré au bilinguisme au théâtre. Le bilinguisme au théâtre est une manière de vulgariser des thèmes socioculturels et de diffuser facilement un message d’incivisme, de cohabitation, d’éducation et bien d’autres à travers la mise en scène d’artistes.
Situé dans le 7e arrondissement de la capitale, le centre Themacult est une maison de théâtre. Dès l’entrée, on découvre les objets d’art accrochés aux murs, la salle des galeries où l’on trouve des expositions d’art, des livres, la salle de cinéma et aussi les galeries de spectacles.
Nous sommes allés voir un grand dramaturge, acteur et metteur en scène tchadien, Garsumu Vangdar, responsable du centre Themacult, né en 1967 à N’Djamène, dans la capitale tchadienne.
Assis sur une chaise en plastique, un ordinateur devant lui et un récepteur radio, nous entendons dès l’entrée l’émission Priorité Santé de RFI. Un homme d’une cinquantaine d’années, géant moustachu et souriant. Il parle de l’importance du bilinguisme en général et dans le monde de l’art en particulier.
Garsumu Vangdar : À propos du bilinguisme, il convient de noter que, depuis son instauration, il a parcouru un long chemin. En tant que praticiens des arts de la scène, notamment du théâtre, je pense qu’une représentation théâtrale interpelle un public et le public a besoin d’une représentation où il a aussi et doit comprendre le message qui est dit, donc dans nos créations théâtrales nous jouons parfois en arabe tchadien et en français et nous jouons aussi parfois en ngambaye où nous montons un spectacle dans lequel il y a les trois langues, pour permettre l’accès au public et pour que le public puisse être touché par le sujet abordé par la représentation. Donc en définitive, l’avantage que nous avons au Tchad, c’est que l’arabe est parlé. On aurait pu continuer dans ce sens pour intéresser nos jeunes à pouvoir parler l’arabe comme ça. Ceux qui parlent français parlent arabe et ceux qui parlent arabe parlent français. C’est quand on parle les deux langues qu’on dit qu’on est bilingue. Mais quand on ne parle qu’une langue, si on parle arabe sans parler français, on n’est pas bilingue. Quand on parle français et qu’on ne parle pas arabe, on n’est pas bilingue. Mais nous essayons de faire ce spectacle pour pouvoir toucher notre public, d’autant plus que notre espace culturel est situé dans un quartier périphérique où il y a des foyers cosmopolites, des gens qui ne parlent pas le français, des gens qui parlent l’arabe tchadien, des gens qui parlent le ngambaye. Notre objectif est donc d’apporter l’art à cette population et aussi de l’intéresser à l’art en proposant des spectacles qui lui parlent, qui l’attirent, qui l’intéressent et qui lui permettent de comprendre ce que nous disons. En cinq ans d’existence, le Centre Temakilt a produit énormément de spectacles en arabe local et en français, afin de toucher le public.
Abdramane : Après 42 ans de théâtre, Van Dijk s’est sacrifié en s’investissant corps et âme dans la production de spectacles bilingues pour donner un cachet particulier à son travail et atteindre son public cible.
Garsumu Vangdar : En général, à notre niveau, quand il s’agit de jouer en arabe, nous faisons plus d’improvisation, c’est-à-dire que nous prenons un sujet et nous le développons ensemble autour d’une table, nous construisons la scène et ensuite nous lui donnons la chair que nous appelons le mot. Il est rare que nous puissions prendre un texte écrit en arabe et l’interpréter en français, parce qu’il y a des gens parmi nous qui ne lisent pas l’arabe littéraire. Nous n’avons donc pas réussi à traduire une pièce arabe en français ou une pièce française en arabe. Et donc, quand on veut le faire, on essaie souvent de résumer les répliques, les mots prononcés dans les pièces en arabe local, qu’on essaie de répéter au fur et à mesure avec les comédiens pour les intéresser à monter le spectacle. Il y a certes des jeunes qui parlent l’arabe et qui aiment faire du théâtre, il y en a aussi qui parlent le français et qui aiment jouer en arabe, mais très peu d’entre eux sont allés étudier l’arabe, donc c’est un vrai défi. Il y a même des jeunes du djihad qui font du théâtre en arabe mais rien qui n’écrive pas du tout l’arabe. Nous sommes dans un système d’improvisation autour d’un sujet ou d’un thème et ils montent le spectacle et le jouent. C’est donc un peu complexe. Ce qui est important, c’est d’intéresser les gens à l’arabe écrit. Et ça, c’est fondamental. Et c’est à nous de le développer, de l’encourager, de faire comprendre la nécessité d’avoir une langue, deux langues, trois langues parlées, parce qu’on n’est pas fermé sur nous-mêmes, parce que le monde est global et unique. Nous sommes appelés à aller vers les autres. Il faut aussi être capable de comprendre certaines choses. Sinon, le fait de parler deux ou trois langues aidera beaucoup la population et le développement.
Abdramane : En effet, malgré les difficultés que rencontrent certains acteurs de ces centres, comme la traduction de textes arabes en français et la maîtrise des langues CD, quelques metteurs en scène arabes à l’arrière de Themacult ont réussi à produire des spectacles bilingues, comme feu Jamal Ahmad Mohamed, qui était l’une des chevilles ouvrières du centre. De son vivant, il a travaillé sur le spectacle bilingue, qui a connu un énorme succès.
Garsumu Vangdar : Oui, parce que très peu de praticiens du théâtre que je connais, la majorité, ne parlent pas arabe, ne connaissent pas l’arabe et ne savent pas comment écrire des critiques. L’un de mes formateurs était… Il est bilingue. Il est diplômé de l’école d’Abéché. Il est allé étudier en Égypte. Il est revenu avec un diplôme d’art dramatique. Il a travaillé pour la Foncière-Police. Aujourd’hui, il est à la retraite. Il s’appelle Mounour Ali. C’est un grand homme de théâtre. C’est lui qui nous a formés. Il existe. Il est toujours là. Il vit maintenant à Baccarat. Il est donc bilingue. Il parle l’arabe. Le français est l’arabe littéraire. Il peut traduire des œuvres, il a monté des spectacles en arabe. À l’époque, il avait un festival de théâtre afro-arabe. C’était une initiative importante, il voulait utiliser l’art pour intéresser les gens au bilinguisme. C’est un fait. Et pour ceux d’entre nous qui sont déjà âgés, la question de la survie, du retard, nous n’avons pas le temps de nous asseoir et de réapprendre. Nous n’avons pas le temps d’aller nous asseoir et de tout réapprendre. L’arabe, même si on l’a déjà appris dans quelques groupes dans le passé, c’était difficile dans les écoles secondaires.
Abdramane : Avez-vous des scènes qui vous ont marqué sur la question du bilinguisme dans les espaces de discussion, notamment dans votre domaine ?
Garsumu Vangdar : Eh bien, en ce qui concerne le bilinguisme, comme je l’ai dit, il y a parfois des émissions où les gens parlent les deux langues. Dans les années 90, il y avait beaucoup de troupes qui faisaient cela. Mais sinon au Tchad, la plupart du temps, vous allez trouver quelque chose qui est joué en arabe, sinon c’est joué en français. Mais il est rare de trouver les deux dans un même spectacle. Mais chaque langue a son propre public.
Et je pense que s’il n’y avait pas de public, le spectacle ne continuerait pas. Jusqu’à présent, il y avait des gens qui faisaient du théâtre en arabe, et il y avait des gens qui faisaient du théâtre en français. Maintenant, il y a un travail artistique à faire, parce qu’on aurait pu aussi, au Tchad, créer la faculté des arts sur la Seine, sinon l’académie des arts pour permettre aux gens de pouvoir se former dans le domaine des arts avec les langues que ce soit en arabe ou en français ça fera un plus c’est possible que ça existe on n’a pas de connaissance et avec qui sortir quand ça sort en arabe tant qu’on n’est pas avec la connaissance on ne comprend pas l’arabe on ne saura pas qu’il y a des acteurs ou des metteurs en scène on connaissait des metteurs en scène qui sont arabophones par exemple feu diam’amal c’est un metteur en scène on l’a perdu à deux ans et on ne sait pas qu’il existe. On l’a perdu à l’âge de deux ans et c’est un grand metteur en scène il est fondamentalement arabe il parle arabe et il a dû apprendre le français il a fait apprendre le français à quelqu’un il parle français normalement il est devenu vraiment bilingue et il a travaillé avec nous parfois je donne mon texte en français il fait la mise en scène et les sept pièces il travaille aussi avec ceux qui parlent arabe il travaille avec eux donc ça veut dire que c’est la richesse comme je dis c’est parler des deux ans d’écriture c’est rare.
Abdramane : Malgré les difficultés rencontrées, Vangdar constate qu’il n’est pas nécessaire d’être absolument bon pour comprendre les scènes. Tout dépend de la scène.
Garsumu Vangdar : Donc du point de vue du spectacle en principe le problème de la langue n’est pas forcément une performance pour une scène mais maintenant c’est comprendre la chose vue sous l’angle écrit du spectacle et parler l’arabe littéraire c’est là où il y a des difficultés parce que très peu le font ici, surtout dans la zone où je développe, c’est vrai qu’il y en a qui vont à l’école en arabe mais toujours pas bilingue, on écrit bilingue mais on n’apprend que l’arabe, on écrit bilingue, on n’apprend que le français, il faut apprendre les deux et c’est ça qui nous bloque.
Abdramane : L’expérience de Vandard dans ce monde montre que si le bilinguisme au Tchad est souvent source de tensions, il peut aussi devenir un puissant vecteur de cohésion sociale. En donnant une voix à la diversité linguistique et culturelle, le théâtre est un moyen prometteur de réparer les fractures sociales. Nous vous remercions de votre écoute. Jusqu’au prochain podcast.
Note : Ce podcast est le résultat d’un atelier et peut être la première réalisation d’une personne, il peut donc contenir des imperfections.
Abdramane Haroun Izerik vient de la ville d’Abéché, une localité située à 9000 km à l’est du Tchad. Licencié en Lettres de l’université Adam Barka d’Abéché, il est actuellement étudiant en Master 1, option linguistique. Fasciné par le journalisme de l’enfance et la littérature, il considère ces deux domaines comme des moyens efficaces pour traiter les problèmes qui traumatisent les sociétés modernes. C’est d’ailleurs l’une des raisons qui le poussent à réaliser des podcasts, afin d’informer le public.